L'introduction du thé en Europe
Dès 1653, la reine Anne Stuart se délecte au petit déjeuner de ce précieux nectar, mais
c'est au 19ème siècle qu'apparaît le très fameux « afternoon tea » en Angleterre
. La duchesse de Bedford (1788-1861) aurait imité une habitude française oubliée en invitant ses amies autour d'une tasse de thé agrémentée de gâteaux et autres sucreries. Pourtant en France, c'est en reproduisant la cérémonie anglaise que l'on se familiarise avec le thé à la fin du 19ème.
Au 17ème et 18ème siècle, le thé devient un enjeu économique majeur entre l'Europe et l'Orient
. En 1606, le thé atteint les côtes européennes sur un navire hollandais, provenant de Java en Indonésie, où était installé un relais-dépôt pour les produits venant d'Orient. Le thé avait dû être apporté par des bateaux chinois et des marchands avaient échangé quelques caisses de thé contre de la sauge dans la perspective d'un nouveau marché. Ironie du sort, c'est le thé qui a pénétré l'occident. La Compagnie des Indes Orientales, fondée en 1599 par la reine Élisabeth d'Angleterre, évinça ses concurrents et obtint le monopole du commerce du thé de 1715 à 1834.
D'abord exporté du Japon, la Chine devient dès 1638 la principale source d'approvisionnement anglaise
.
L'opium et le thé
Fin 18ème, les britanniques ont mis en place un commerce triangulaire
: le pavot produit dans les colonies indiennes, transformé en opium, était échangé contre du thé en Chine, et vendu ensuite sur le marché européen. En 1800, la Chine interdit son importation et tenta d'éradiquer la contrebande organisée par les anglais. En 1839, Lin Zexu, envoyé extraordinaire de l'empereur, saisit 20 000 caisses d'opium et les brûla sur une plage près de Canton.
Les Anglais déclenchèrent alors une suite d'opérations militaires appelées les deux « guerre de l'opium »
(1840-1842 et 1856-1860) pendant lesquels pillages et saccages furent perpétrés. Le nombre d'opiomanes chinois passa de deux millions en 1850 à 120 millions en 1878. L'Angleterre n'en interdira le commerce que quelques décennies plus tard lorsque l'opiomanie se retournera contre nombre de proches de la Couronne.
La culture du thé dans les colonies britanniques
En 1823, le Major Robert Bruce découvrit en Assam (à l'extrémité de l'Inde) une espèce indigène de théier
, cultivée par des tribus indiennes. En 1834, pour pallier la perte de son monopole, la Compagnie des Indes Orientales entreprit la culture du thé en Inde.
En 1848, le botaniste Robert Fortune fut envoyé en Chine pour découvrir ses secrets et déroba environ 20000 plants et huit fabricants de thé pour mener à bien les projets de la Compagnie des Indes Orientales en Inde et à Ceylan.
C'est la variété assamaise de Robert Bruce, qui s'acclimata le plus à la chaleur de l'Inde, et c'est aujourd'hui celle qui est cultivée dans bon nombre de pays producteurs
. Dès 1887, les importations en provenance des colonies anglaises devinrent plus importantes que celles venant de Chine. Depuis, le thé est cultivé en Amérique du Sud (Argentine, Brésil, Equateur, Pérou...), en Afrique (Kenya, Zimbabwe, Rwanda, Cameroun, Malawi, Mozambique, Ethiopie...), en Géorgie, en Turquie, en Iran, en Indonésie, au Viêt-nam, sur l'île Maurice, aux Açores, en Malaisie... Il y eut même quelques essais peu concluants en Bretagne, à Paris et en Corse. A l'exception de quelques pays, comme la Chine, l'Indochine, l'Inde (les tribus de l'Assam), et le Japon, tous les autres pays ne sont que de jeunes producteurs dont les plantations commerciales ne remontent pas plus loin qu'au 19ème voire au 20ème siècle.